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Commentaire (rattrapage 2nde 7)

Texte à commenter : Adieu à Graziella, Troisièmes méditations, Alphonse de Lamartine ;

 

Adieu! mot qu'une larme humecte sur la lèvre ;
Mot qui finit la joie et qui tranche l'amour ;
Mot par qui le départ de délices nous sèvre ;
Mot que l'éternite doit effacer un jour!

Adieu!.... Je t'ai souvent prononcé dans ma vie,
Sans comprendre, en quittant les êtres que j'aimais,
Ce que tu contenais de tristesse et de lie,
Quand l'homme dit: "Retour!" et que Dieu dit :

"Jamais!"

Mais aujourd'hui je sens que ma bouche prononce
Le mot qui contient tout, puisqu'il est plein de toi,
Qui tombe dans l'abîme, et qui n'a pour réponse
Que l'éternel silence entre une image et moi!

Et cependant mon coeur redit à chaque haleine
Ce mot qu'un sourd sanglot entrecoupe au milieu,
Comme si tous les sons dont la nature est pleine
N'avaient pour sens unique, hélas ! qu'un grand adieu !

 

 

 

Devoir de Claire D. :

 

 

 

            Le romantisme est un courant littéraire qui fait son apparition dans le courant du XIXème siècle. Il s’oppose au classicisme en cela que les poètes expriment désormais librement leurs sentiments, en particulier grâce au lyrisme. Alphonse de Lamartine est un de ces auteurs phare du Romantisme, dont le recueil « Troisièmes méditations » connut un grand succès. Le poème « Adieu à Graziella » est extrait de cet ouvrage. On y retrouve deux thèmes récurrents propres au Romantisme : la fuite du temps et le lyrisme douloureux.

 

 

 

            Tout d’abord, la fuite du temps est perçue au travers d’un amour révolu et de la perte d’êtres chers au poète, comme en témoigne l’utilisation de l’imparfait dans des expressions telles que «  les êtres que j’aimais » (v.6) ou encore « ce que tu contenais » (v.7). On remarque donc une opposition directe avec la strophe trois qui débute par «  Mais aujourd’hui » (v.9), ce qui renforce le sentiment que les moments les plus heureux se trouvent déjà enfouis dans le passé. De même, le poète insiste sur ces instants écoulés lorsqu’il parle de « mot que l’éternité doit effacer un jour » (v.4). En effet, il accentue le fait que l’éternité n’est qu’illusion et peut être rompue en l’espace d’un instant. Le temps dans sa course l’a donc soudainement piégé et privé d’amour. De même que sa période amoureuse se traduit par des allitérations douces en [l], [s] et [m] avec des mots tels que « mot » (v. 1,2,3,4), « larme » (v.1), « l’amour » (v.2), « délices » (v.3), « sèvre » (v.3), « j’aimais » (v.6), « lie » (v.7), de même la réalité se traduit par le biais de sonorités plus dures, telles que des allitérations en [r] et [t] avec des mots tels que « tranche » (v.2), « départ » (v.3), « éternité » (v.4), « comprendre » (v.6), « retour » (v.8), « contient tout » (v.10). L’expression d’un passé heureux en opposition avec un présent mélancolique accentue donc la fuite du temps.

            Par ailleurs, cette tristesse s’explique aussi par le champ lexical de la rupture et du départ qui est omniprésent tout au long du poème. En témoignent les expressions « finit » (v.2), « départ » (v.3), « effacer » (v.4), « quittant » (v.6). De la même manière, les mots « larme » (v.1), « tristesse » (v.7), « sourd sanglot » (v.14) ont une connotation triste et accompagnent la venue de la mort, euphémisée lorsqu’ Alphonse de Lamartine écrit « plein de toi qui tombe dans l’abîme » (v. 10,11) et « éternel silence » (v.12). Ce sont en fait des images qui ont pour but d’évoquer la perte de Graziella de manière plus douce. Le temps est donc mortifère et plonge d’une certaine manière les êtres qui entourent le poète dans un abîme au fur et à mesure que la vie continue. On ajoutera que les vers quinze et seize, « Comme si tous les sons dont la nature est pleine/ N’avaient pour sens unique, hélas ! qu’un grand adieu ! » ont une double signification. En effet, ils peuvent être perçus comme le fait que les sons de la nature ne signifient qu’« adieu », ou que ceux-ci n’indiquent véritablement que le chemin de la rupture, de la mort. C’est donc une fin inexorable qu’apporte le temps avec lui.

            De plus, la structure du poème renforce le thème de la fuite du temps, comme le montre la césure au niveau de la dixième syllabe du vers 8 : le mot « jamais » écrit à la ligne permet la continuation de l’alexandrin mais traduit une accélération. Ce changement de rythme témoigne une fois de plus de la fuite du temps et de sa rapidité. Par ailleurs, les césures à l’hémistiche des vers dix et onze permettent aussi de créer une rythmique qui s’oppose à la lenteur des alexandrins et exprime une rapidité. Pour finir, l’anaphore de « Adieu » au début des strophes une et deux, ainsi que dans le dernier vers, accentue encore la fuite du temps tout en donnant un aspect musical au poème.

 

 

 

            Dans ce poème, la fuite du temps engendre l’utilisation récurrente d’un lyrisme douloureux, propre à exprimer les émotions fortes du poète. En effet, il traduit au fil du poème une rupture douloureuse, notamment grâce à l’utilisation d’une ponctuation forte, qu’elle soit dans les strophes ou à leur fin. De nombreux points d’exclamation, comme le montrent les expressions « Adieu ! » (v.1,5), « un jour !» (v.4), « Retour !» (v.8), « hélas ! » (v.16), témoignent donc d’une douleur que le poète tente d’exprimer à l’écrit, comme pour se libérer du mal qui le ronge. L’anaphore de « mot » (v.1,2,3,4) est elle aussi représentative d’une vivacité qu’a Alphonse de Lamartine à se libérer de sa douleur, qui est ressentie au travers de sonorités criardes telles que l’assonance en [i] des mots « finit » (v.2), « délices » (v.3), « vie » (v.5), « tristesse » (v.7), « aujourd’hui » (v.9), « silence » (v.11). De même, de nombreuses expressions à connotation triste sont utilisées, telles que « larme » (v.1), « tristesse » (v.7), « sourd sanglot » (v.14) et l’expression « hélas ! » (v.16) qui conclue d’une certaine manière le poème, renforçant ainsi la sensation de désespoir évoquée par le poète.

            De la même manière la douleur de celui-ci s’accompagne par sa solitude. En effet, l’expression « sourd sanglot » (v.14), traduit un manque d’attention et une incompréhension de la part des personnes qui l’entourent. De plus, il semble n’avoir plus personne à qui se confier désormais, comme en témoigne l’expression « le mot qui contient tout […] et qui n’a pour réponse que l’éternel silence entre une image et moi !» (v.10, 11,12) qui signifie qu’il ne se parle plus qu’à lui même, c’est à dire au reflet de son miroir. Sa conversation muette est le résultat de la perte des êtres chers qui l’entouraient, cause de tristesse et de nostalgie.

 

 

 

            Au fur et à mesure que le temps passe, le poète est donc pris au piège et ne peut qu’éprouver finalement que de la douleur. L’expression du moi dans ce poème lui permet donc de se libérer de sa souffrance, comme un remède au mal être qui l’habite. Gérard de Nerval y voyait lui aussi un moyen de se soulager de ses crises de folie alors qu’il était interné à la clinique.

 

Claire D., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis, avril 2009.


Commentaire de Louise F. :

La France voit, au XIXème siècle, apparaître un nouveau genre littéraire et artistique : le Romantisme. Homme politique, écrivain mais surtout poète, Alphonse de Lamartine s’impose comme l’un des fondateurs de ce mouvement. A trente ans, il écrit Troisièmes méditations, dont est extrait « Adieu à Graziella », un poème d’adieu à la femme dont il est éperdument amoureux. Le poète exprime, à travers ce poème, un lyrisme douloureux dû à la fatalité de la fuite du temps.

 

 

 

Tout d’abord, Lamartine exprime ses sentiments douloureux à travers l’écriture. Le pète a perdu ses repères. Il ne s’adresse pas à la même personne tout au long du poème : au vers 5 et 7, le « t’ » et le « tu » désignent le mot « adieu » alors que le « toi » du vers 10 désigne Graziella, à qui il adresse ce poème. Les anaphores de « mot » (vers 1, 2, 3, 4,10 et 14) ainsi que d’  « adieu » (vers 1, 5,16) traduisent son obsession envers l’actuel départ. LA métaphore filée que forme la personnification du mot « adieu » témoigne encore de l’égarement du poète. L’incompréhension de Lamartine indiquée par « sans comprendre » (vers 6) marque la confusion de ses sentiments.

            De plus, Alphonse de Lamartine exprime sa douleur due à sa séparation d’avec Graziella à travers un champ lexical de la tristesse : « larme » (vers 1), « tristesse » (vers 7), « lie » (vers 7), « sanglots » (vers 14). La métaphore « une image » (vers 12) traduit la peine qu’a le narrateur à se souvenir de la femme qu’il aime mais qui n’est déjà plus qu’un souvenir. La ponctuation forte du poème, faite de points d’exclamation (vers 4, 5, 8, 12 et 16) et de points de suspension (vers 5) n’est que la traduction stylistique d’une souffrance exprimée dans le siège de ses sentiments : « [son] cœur » (vers 13).

            Enfin, le poète ressent de la mélancolie au souvenir des jours passés avec sa bien-aimée. « La joie » (vers 2), « l’amour » (vers 2), les « délices » (vers 3) forment un champ lexical du bonheur qui rapporte aux jours passés ensembles. L’allitération en [m] et [l] (mot qu’une larme humecte sur la lèvre) invite, de pars ses sonorités douces, à la paix et au souvenir. Mais le poète est rappelé à la dure réalité dans la troisième strophe par le chagrin (« éternel silence » (vers 12), « sanglot » (vers 14)), mettant ainsi un terme définitif aux sentiments qu’il éprouvait pour Graziella.

 

 

 

            Alphonse de Lamartine ressent une douleur profonde face à la détresse de la perte et à la mélancolie de pars son incapacité à échapper au temps. Les mots « éternité » (vers 4) et « souvent » (vers 5) semblent inviter le poète à une souffrance infinie. Cette impression de fatalité résulte aussi de l’hyperbole « éternel silence » (vers 12) qui désigne le seul lien qui demeurera entre Lamartine et Graziella. Afin d’accentuer cette longueur, le choix de l’alexandrin semble adéquat. De même, m’utilisation des mots « abîme » (vers 11), « tout » (vers 1à), « plein » (vers 10) est idéale car ces trois mots portent une connotation qui se rapproche de l’infini. Les temps à venir pour Lamartine semblent longs et pénibles.

Néanmoins, le temps écoulé aux côtés de Graziella est définitivement révolu. Les antithèses et les oxymores « finit la joie » (vers2, « tranche l’amour » (vers 2), « de délices nous sèvre » (vers 3) portent toutes l’idée d’un bonheur injustement enlevé. La séparation entre les deux premières strophes dédiées au passé et les deux dernières est marquée par le connecteur logique « mais » suivit de « aujourd’hui ». On peut aussi remarquer un lien étroit entre les paronymes « j’aimais » (vers6) et « jamais » (vers 8), comme si le temps avait enlevé à Lamartine toute chance de pouvoir aimer à nouveau.

Pour terminer, le poète ne contrôle plus sa vie. « Le départ » (vers 3) est arrivé bien trop vite mais le temps de dire  « adieu » semble lui éternel. Les deux derniers vers décrivent ainsi la présence de « adieu » dans tous les éléments qui l’entoure. L’allitération en [s] (« sourd sanglot »; « si tous les sons » ; « sens unique » ; hélas ! ») rappelle le son du passé. Pour Lamartine, le temps est une fatalité qui lui prend son amour et le condamne à l’éternelle souffrance.

 

 

 

Lamartine exprime dans ce poème ses sentiments incertains de douleur et de mélancolie infligés par la fuite du temps. Face à ce futur de souffrance, Lamartine se confie aux mots et se dévoue à l’écriture. C’est ainsi qu’il écrira ses plus beaux poèmes tel que « Le Lac ».

 

Louise F., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis, avril 2009.


Date de création : 20/04/2009 @ 09:30
Dernière modification : 03/06/2009 @ 13:23
Catégorie : Copies d'élèves 2008/2009
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